Bonjour M. Voyer,
Merci pour votre beau travail pour les aînés. J'apprécie votre spécialité. J'aimerais que la spécialité IPS s'offre un jour en gérontologie. Je prendrai le risque de retourner aux études pour aller suivre la formation.
J'aimerais votre avis sur un sujet.
Je suis une infirmière noire. Hier, un patient m'a dit " quand on est noire de même, on prend pas de place"
Je sais qu'il est supposé être en trouble cognitif mais son commentaire m'a vraiment fait de la peine. Malheureusement ou Heureusement c'est moi l'ASI, certains rôles et certaines tâches m'appartiennent. Je ne peux pas " NE pas prendre ma place d'ASI" pour plaire à ce patient.
Pouvons-nous éduqué nos personnes aînés avec des propos racistes en leur disant qu'une personne noire a des droits. Avec la montée de l'immigration, il me semble que ce serait gagnant d'éduquer lorsque c'est nécessaire et faisable, qu'en pensez-vous?
Sont-ils trop malades pour comprendre certains aspects?
Est-il trop tard pour remédier à des propos racistes? Quelle devrait être la démarche à suivre dans cette situation selon vous?
Daphney Sylvain
Merci beaucoup pour votre réponse M. Voyer
Bonjour madame Sylvain,
Tout d'abord, je tiens à vous exprimer toute ma sympathie face à la situation désagréable que vous avez vécue. Les propos que vous avez entendus sont inacceptables et ne devraient pas avoir leur place dans un cadre professionnel ou ailleurs. Votre préoccupation est légitime et reflète un enjeu sociétal important.
Je vais me risquer à une réponse, mais prendre en compte que je ne suis aucunement un spécialiste de ces questions. J’espère ardemment que d’autres personnes pourront ajouter des éléments de réponses constructifs à cette discussion. Je dis bien que je vais risquer d'offrir une réponse, car il faut admettre d'emblée que si la personne âgée n'a pas de problème cognitif, il est beaucoup plus facile d’intervenir. Il faut intervenir auprès d'elle pour lui expliquer les enjeux afin que ce comportement cesse. Le problème que vous soulevez est le fait que la personne est atteinte de problème cognitif qui affecte son jugement. Ainsi il faut avoir des attentes réalistes concernant notre capacité à intervenir dans de telles circonstances.
Si les problèmes cognitifs sont légers à modérer, tout effort d'éducation ou de sensibilisation peut apporter des résultats. L'éducation sur les droits fondamentaux et le respect de la diversité devra être adaptée à leur niveau de compréhension. Il est important d'approcher ces situations avec empathie, patience et ouverture. Voici quelques suggestions sur la manière de procéder :
1.Établir un dialogue respectueux : tentez d'engager la conversation de manière calme et respectueuse, en expliquant l'importance du respect mutuel, indépendamment de l'origine ethnique ou de la couleur de peau.
2. Utiliser des exemples concrets : parfois, des exemples concrets ou des histoires peuvent être plus efficaces pour communiquer des idées complexes.
3. Adapter la communication : ajustez votre message en fonction de la capacité cognitive de votre interlocuteur, en veillant à le rendre aussi accessible que possible.
4. Soutien des collègues et de la direction : Cherchez le soutien de vos collègues et de la direction pour créer un environnement inclusif et respectueux pour tous. Il pourrait être utile de mettre en place des formations ou des ateliers sur la diversité et l'inclusion pour tout le personnel.
5.Protéger votre bien-être : face à des commentaires racistes, il est crucial de prendre soin de soi. Cherchez du soutien auprès de collègues, de mentors ou de professionnels si nécessaire. Il ne faut pas minimiser ces propos.
6. Politiques et procédures : Vérifiez si votre lieu de travail dispose de politiques et de procédures pour traiter les comportements racistes ou inappropriés. Le cas échéant, n'hésitez pas à les invoquer.
Bien qu'il soit crucial d'éduquer et de sensibiliser nos aînés au respect et à l'égalité, il faut également reconnaître que certains troubles cognitifs peuvent altérer significativement la personnalité et le comportement. Les atteintes sévères, surtout celles affectant les lobes frontaux et temporaux, peuvent entraîner une désinhibition, amenant ainsi la personne à exprimer des propos qui ne reflètent pas nécessairement ses convictions ou son comportement antérieur. Face à cela, il est primordial d'adopter une approche empathique, comprenant que ces manifestations peuvent être le résultat direct de la maladie. Cela ne signifie pas de tolérer le racisme, mais plutôt reconnaître l'origine de ces comportements et d’avoir des attentes réalistes pour la suite des choses. Les proches aussi peuvent vivre une honte énorme dans une telle situation. Ils se sentent bien impuissants.
Finalement, si les problèmes de mémoire sont sévères et qu'il n'y a pas vraiment de capacité d'encodage de nouvelles informations, il faut bien admettre que notre capacité à lui faire faire les apprentissages requis sera futile. Qui plus est, si la famille nous dit qu'elle n'a jamais présenté ce type de propos, il faut alors comprendre que c'est la maladie qui affecte cette personne et malheureusement ça se traduit comme cela dans ses comportements. Le soutien par les pairs et la direction deviennent alors primordiaux pour bien protéger le bien-être du personnel.
Pour conclure, la maladie étant neurodégénérative, il est fort probable que ces propos vont s’estompés avec l’avancement de la maladie.
Philippe