Bonjour,
nous sommes infirmières cliniciennes au programme de psychogériatrie. Notre travail consiste à évaluer des personnes âgées avec un déclin cognitif complexe, à domicile, dans l'objectif de produire un rapport d'évaluation, afin de guider le médecin traitant dans son diagnostic, ou bien de l'orienter vers d'autres démarches ou ressources.
Nous administrons des tests de dépistage cognitifs, faisons des mises en situations pratiques et théoriques, questionnons et observons le fonctionnement et questionnons l'histoire de vie. Les informations sont aussi comparées aux impressions des proches de l'usager.
Nous nous questionnons sur ce que nous avons le droit d'écrire ou non dans notre rapport.
-Par exemple, pouvons-nous détailler les caractéristiques de la mémoire selon ses différentes composantes en y associant des éléments de nos observations/évaluations ? Mes collègues antérieures étaient réticentes à diviser nos observations selon des sections de mémoire car un exemple peut être représentatif d'une atteinte à plus d'une sphère de la mémoire...
-Pouvons-nous référer au DSM-5 pour démontrer des similarités entre nos observations et un possible diagnostique, par exemple, dépression, trouble d'anxiété, déficience intellectuelle, trouble lié à l'usage de l'alcool, etc.
-Pouvons-nous associer les résultats obtenus aux tests cognitifs aux principaux TNC, comme illustré dans le tableau en pièce jointe?
Merci, au plaisir!
Bonjour madame Hébert,
Je vous remercie pour votre question. Sachez qu'il est tout à fait approprié de documenter et décrire les manifestations cliniques observées, qu'elles soient directement constatées ou mesurées à l'aide d'instruments spécifiques. Par exemple, la présence d'une désorientation spatiale ou de difficultés avec la mémoire prospective, si elles peuvent être documentées, ne rencontrent aucun obstacle légal à leur description. Au contraire, cette démarche est bénéfique pour la collaboration interprofessionnelle. La capacité à décrire ces manifestations de manière claire, en appuyant vos observations sur des exemples concrets, facilite la compréhension des liens possibles, comme entre une altération de la mémoire prospective et l'oubli répété de prise de médicaments.
Il est important de noter que ces liens sont présentés sous forme d'hypothèses ou de suggestions, et non comme des confirmations objectives de la cause d'un problème cognitif. En général, c'est le neuropsychologue qui est le mieux placé pour établir de tels liens de manière formelle.
En ce qui concerne le diagnostic médical, il reste la prérogative des médecins. Le diagnostic différentiel qu'ils posent va au-delà de la simple description des symptômes pour rechercher la ou les causes sous-jacentes, qu'elles soient vasculaires, métaboliques, ou autres, susceptibles d'expliquer les troubles cognitifs observés. Il est crucial de comprendre que la description précise d'une manifestation clinique ne constitue pas en soi un diagnostic.
Concernant l'interprétation des résultats de tests cognitifs et leur association avec des troubles neurocognitifs majeurs, je tiens à exprimer plus de réserves. Ces précautions ne découlent pas de considérations légales, mais plutôt de l'ambiguïté des données scientifiques à ce sujet. Par exemple, une faible performance à un test de l'horloge peut être associée à divers types de troubles neurocognitifs majeurs, rendant hasardeux l'établissement de liens directs.
Pour plus d'informations sur ce sujet, je vous invite à consulter l'infolettre dédiée à cette question.
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