Bonjour,
Voici un questionnement que je souhaite partager et j'espère avoir des retours constructifs afin de mieux éclairer ma pratique, la relève et s'il y a lieu, améliorer les soins aux ainées.
Bonjour M. Voyer,
J'aimerais vous faire part d'un énoncé dans une de vos vidéos formations sur la plateforme Youtube qui m'a fortement remis en question. Je tiens à préciser que ce message se veut réflexif et je suis tout à fait ouvert à être guider ou orienter vers d'autres ressources/références pour parfaire mes connaissances.
Mise en contexte: je suis IPSSM de formation et présentement j'enseigne au collégial. Je préparais un cours d'éthique et droits en liens avec la personne âgée. Afin de stimuler la discussion, nous demandons l'avis des élèves sur le sujet de l'administration de la médication dans la nourriture pour une personne âgée inapte à consentir. Nous utilisons une de vos capsules comme support (11- Camoufler des médicaments dans la nourriture - YouTube)
Je suis resté surpris d'entendre qu'il est proposé d'aller chercher le consentement de "La conjointe dont le mari est atteint de la maladie d'Alzheimer pour qu'elle nous autorise lorsque par exemple le marie refuse de prendre sa médication de la cacher dans la nourriture [...] on peut même s'entendre sur quel type de médicament [...]." (Timestamp 2min49) (Timestamp 6min07) (Timestamp 6min42)
Cette pratique, à mes yeux, va à l'encontre de notre code de déontologie infirmière. En effet, malgré l'inaptitude déclarée de la personne, l'infirmière doit ; maintenir la relation de confiance et mettre en place différentes approches thérapeutiques ou non thérapeutiques afin de procéder aux soins. Je cite un article de l'OIIQ au sujet de majeur inapte à consentir : "Les approches retenues doivent en tout temps être empreintes de bonne foi, donc ne pas abuser de la confiance de la cliente ou du client, par exemple en cherchant à dissimuler un médicament envers lequel un refus catégorique aurait été exprimé"¹.
De plus, l'infirmière doit tout de même considérer la possibilité d'un refus catégorique de la personne inapte (par exemple à prendre sa médication) qui peut se manifester de manière verbale ou tacite. Dans un cas de refus catégorique, il faudra alors s'adresser au tribunal pour demander une demande en autorisation de soins pour envisager une pratique telle que camoufler ou cacher. "Il arrive que, malgré le consentement substitué, la personne déclarée inapte à consentir refuse catégoriquement le soin proposé. Dans ce cas, l’autorisation du tribunal est nécessaire afin d’obtenir une ordonnance en autorisation de soins malgré le refus de la personne."²
En espérant que ce message sera reçu comme une occasion de réfléchir sur la pratique dans une telle situation. Je répète que je suis ouvert à un retour constructif également, tout en ayant en tête le désir d'enseigner les bonnes pratiques à la relève infirmière.
Merci
Steve Alix
Bonjour monsieur Alix,
Je vous remercie sincèrement pour cette question très pertinente. Si vous utilisez l'outil de recherche dans ce forum, vous constaterez que ce sujet a déjà été abordé à plusieurs reprises. Nous y avons discuté des aspects déontologiques et législatifs qui justifient ces suggestions dans la vidéo. Cela dit, il est important de reconnaître que le sujet est à la fois complexe et délicat.
Je suis heureux de vous informer que la communauté de pratique sur les soins aux aînés en hébergement a produit un guide pour soutenir le personnel infirmier dans l'obtention du consentement, ou du consentement substitué, en tenant compte des différentes règles et décisions juridiques. Ce document est actuellement en cours de révision finale par un cabinet d'avocats.
Dès que ce guide sera prêt et publié, je l'annoncerai sur mon blog, dans mon infolettre ainsi que sur mes réseaux sociaux. J'ai hâte d'atteindre cette étape, car cela vous permettra de connaître avec précision les bases éthiques et juridiques qui sous-tendent cette suggestion.
Merci pour votre compréhension.
Philippe